christine gendre-bergère

communeuses !

En 2021, en voisine et amie, j’étais au Père Lachaise, devant le Mur des Fédérés pour le 150e anniversaire de la Commune de Paris. Là où 147 fédérés, combattants de la Commune, ont été fusillés par l’armée versaillaise à la fin de la Semaine sanglante (du 21 au 28 mai 1871). La célébration joyeuse et combattive, baroque par bien des aspects, m’a donné envie d’en savoir plus. J’ai beaucoup lu sur leur histoire. J’ai découvert grâce à Ludivine Bantigny que ces citoyennes engagées dans la Commune de Paris préféraient se dire Communeuses plutôt que communardes, au suffixe péjoratif. J’ai immédiatement adopté ce titre pour cette suite de 15 gravures. Elles se nommaient Victorine Brocher, Herminie Cadolle, Hortense David-Machu, Marie Davier, Elisabeth Dmitrieff, Marguerite Guinder-Lachaise, Nathalie Lemel, André Léo, Rosalie Martin (dite La Bordas), Louise Michel, la plus connue, Paule Minck, Eulalie Papavoine, Noémi Reclus, Elisabeth Rétiffe et Léontine Suétens. Elles sont corsetière, chanteuse lyrique, blanchisseuse, ouvrière relieuse, confectionneuse pour dames, journaliste. Louise Michel est institutrice.

. … et en rouge, dans mes gravures, superposée, Eugénie, mon arrière-grand-mère, née le 27 novembre 1867. Elle est dans les bras de Julie, sa mère, blanchisseuse à Paris, pendant la Commune, photographiée par un anonyme. Ma grand-mère, Louise, m’a légué cette photo. Elle aimait parler de ses origines parisiennes et d’un souvenir que sa mère, Eugénie, lui racontait. Enfant, un communeux lui avait offert un carré de chocolat…

Les quatorze portraits sont inspirés des photos d’Eugène Appert, photographe partisan des Versaillais. Elles sont, pour la plupart, prises à la prison de Versailles. Durant la Commune, Eugène Appert effectue, pour le compte de Thiers un grand nombre de clichés de la répression versaillaise, à la fois sur le terrain et dans la prison où sont détenues les communeuses. Dans les semaines qui suivent les événements de la Semaine sanglante, il produit une série de photomontages intitulés Les Crimes de la Commune. Il utilise ce procédé pour donner l’impression d’avoir photographié une réelle action, inventant avant l’heure les fake news. Il y présente notamment l’exécution d’otages à la prison de la Roquette.

André Léo
Victorine Brocher
Rosalie Bordas
Herminie Cadolle